mardi 23 avril 2013

Effets Secondaires - Steven Soderbergh



Réalisé par Steven Soderbergh
Ecrit par Scott Z. Burns
Musique Originale : Thomas Newman
Avec : Rooney Mara, Jude Law, Channing Tatum, Catherine Zeta Jones... 
1h46
Sortie : 3 avril 2013

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Depression jubilatoire

Piégée et Magic Mike avaient marqués 2012, par leur simplicité et efficacité, ou un renouvellement artistique du blockbuster. Steven Soderbergh, depuis quelques années, en pleine boulimie de projets, ne réalise pas moins de deux longs métrages par ans. Avec Effets Secondaires, annoncé comme son avant dernière oeuvre, Soderbergh nous livre un grand thriller hitchcockien naturel et jouissif, auquel tous types de spectateurs pourra adhérer, cinéphiles ou non.   

Synopsis : Jon Banks est un psychiatre ambitieux. Quand une jeune femme, Emilie, le consulte pour dépression, il lui prescrit un nouveau médicament. Lorsque la police trouve Emilie couverte de sang, un couteau à la main, le cadavre de son mari à ses pieds, sans aucun souvenir de ce qui s’est passé, la réputation du docteur Banks est compromise…

Soderbergh, comme toujours, s'entoure d'un casting parfait et irréprochable : Rooney Mara, Jude Law, Catherine Zeta Jones, ou encore Channing Tatum (brillantissime dans Piégée et Magic Mike). Soderbergh ne se contente pas de simplement les diriger, mais les intègre à sa mise en scène artistique et sublime pour créer un thriller médical d'une rare immersion. L'utilisation des filtres, les ralentis, la musique bien dosée, tous les ingrédients du cinéma de Soderbergh se retrouvent dans Effets Secondaires. Pour créer quelque chose de neuf ? Non, pas forcément, et ce n'est pas son but. En ce sens Effets Secondaires peut nous évoquer Passion de Brian de Palma : un film classique de son auteur, mais efficace dans le paysage audiovisuel de notre époque, peinant grandement à se renouveler. 
Le sujet d'Effets Secondaires nous évoque aussi un autre "Soderbergh médical", Contagion (2011). Film terriblement démonstratif et très catalogué, à l'encontre d'un thriller classique mais manquant de subtilité et d'idées de mise en scène (c'est en celà que Soderbegh excelle le plus souvent). En souhaitant faire plus classique, Effets Secondaires nous marquera plus que Contagion. Un scénario riche en rebondissements jusqu'à sa dernière seconde. Doit en s'en plaindre ? Le caractère hitchcockien d'Effets Secondaires est l'aspect le plus charmeur du film, tout comme Passion. Le premier plan, avec une caméra partant d'un plan large pour venir s'encastrer dans une fenêtre d'immeuble n'est autre que celui du début du Psychose d'Hitchcock. Référence balourde ? Non, car Soderbergh, depuis Sexe, mensonges et vidéos (1989) est avant tout un auteur, et ne se contente pas de plaquer des clins d'oeil ridicules à ses idoles dans ses films. Ce n'est pas non plus un maniériste comme De Palma. Simplement un cinéaste nostalgique, fait rarissime dans notre époque (on pense aussi à Abel Ferrara). 

La réussite d'Effets Secondaires tient également et surtout à une nouvelle Marnie (Tippi Hedren) interprétée par la sublime et renversante Rooney Mara, révélée dans le Millenium de David Fincher. Soderbergh cherchait une actrice de confiance, transparente en apparence, pleine de charme pour le spectateur. A l'inverse de Rachel Macadams dans Passion, Rooney Mara n'est pas une femme fatale du film noir classique, ni son opposée. Son caractère ne doit pas être exposé frontalement, pour que nous essayions de la comprendre, et de, nous aussi, jouer le rôle du docteur Banks (Jude Law). 

La place d'Effets Secondaires dans la carrière de Soderbergh est plutôt aléatoire. Si le Che demeure son oeuvre majeure, ses trois derniers films resteront mineurs, ne s'étant pas exposé en festivals. La dualité du cinéaste est elle aussi quelque chose de relativement rare : Cinéaste cannois (Sexe, mensonges et vidéos, Che), Soderbergh se distingue aussi dans le pur cinéma hollywoodien (Magic Mike, la trilogie Ocean's) proposant du divertissement anti-académique ultra jouissif et esthétiquement très séduisant. Effets Secondaires pourrait, tout comme Piégée, chevaucher les deux catégories de films de Soderbergh. 

Ne reste plus que Behind The Candelabra, en compétition cette année au festival de Cannes. Oui, Steven prend sa retraite. Dans de récentes interviews, il évoque le fait de vouloir utiliser autre chose que le cinéma pour s'exprimer (exemple : le théâtre). C'est à cela que nous reconnaissons les grands cinéastes, mêlant subtilement film de genre et film d'auteur. Steven, tu va nous manquer.  

Jeremy S.


Docteur Banks (Jude Law)

Emily (Rooney Mara) et Martin Taylor (Channing Tatum)


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